9 décembre 1905- 9 décembre 2005

9 décembre 2005

100 ans. Elle a 100 ans, la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat. C’est là un événement majeur. Elle s’inscrivait dans la logique de la première sécularisation, celle qui permettait à la science, à la suite de l’«affaire Galilée», de s’émanciper par rapport à la tutelle de la « théologie » ; et surtout dans la logique de la seconde sécularisation, celle du politique par rapport à l’Eglise, qui devait pousser le pape Léon XIII à demander aux catholiques de France de «se rallier» à la République… Le « siècle des Lumières » était passé par là… Evidemment, l’Eglise a résisté. Résisté jusqu’à se sentir tellement « assiégée » qu’elle n’était même pas capable de reconnaître les « droits de l’homme », ces droits qui nous paraissent pourtant aujourd’hui tellement dans la logique de l’Evangile… Elle avait, il faut le dire, quelques bonnes raisons de résister, à commencer par le fait que ces « droits de l’homme » étaient alors opposés aux « droits de Dieu ». Alors, évidemment…Depuis un siècle, les choses se sont bien décantées. En 1996, les évêques de France dans leur « Lettre aux catholiques » ont souligné que « nous acceptons sans hésiter de nous situer, comme catholiques, dans le contexte culturel et institutionnel d’aujourd’hui marqué notamment par l’émergence de l’individualisme et par le principe de laïcité » (p. 20). Ils ajoutent un peu plus loin : « Nous tenons à être reconnus non seulement comme des héritiers, solidaires d’une histoire nationale et religieuse, mais aussi comme des citoyens qui prennent part à la vie actuelle de la société française, qui en respectent la laïcité constitutive et qui désirent y manifester la vitalité de leur foi » (p. 28).Ce principe de laïcité, qui est l’une des bases les plus précieuses de notre démocratie, n’a pas été admis ou compris par tous : des idéologies, que l’on pourrait appeler « cléricarde » et « laïcarde », se sont opposées, la première voulant maintenir le pouvoir social et politique de l’Eglise comme telle, la seconde travestissant la laïcité en « laïcisme », c’est-à-dire glissant de la neutralité par rapport aux divers cultes religieux (garantis par l’Etat) vers un militantisme anti-religieux. Les villages de France d’il n’y a pas encore si longtemps sont remplis d’anecdotes du genre Don Camillo et Peppone…Aux disciples du Christ que nous sommes, il appartient de faire en sorte que la laïcité soit doublement une chance. Une chance, pour le dialogue entre les religions, de plus en plus indispensable aujourd’hui. Une chance ensuite pour nous-mêmes : elle peut nous pousser en effet à « aller au cœur de la foi » et elle peut ainsi nous permettre, dans un monde sécularisé où le religieux, même chrétien, n’est plus perçu comme allant de soi, de re-choisir le Christ pour vivre de manière plus décidée à sa suite. N’est-ce pas ce défi-là (difficile, il est vrai, et requérant de nous que nous fassions certains « deuils ») qui rend nos communautés chrétiennes si vivantes ?

Père Louis-Marie Chauvet

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