Lettre à ceux qui se demandent ce que « Trinité » veut dire.

10 juin 2017

Cher chrétien(ne)

Peut-être l’as-tu déjà découvert dans ton quotidien : il n’y a pas d’amour sans risque. De même, Dieu ne se protège pas de nous. Il accepte que l’on puisse lui dire NON, il accepte nos limites et nos erreurs de parcours. Mais cela ne veut pas dire qu’il est résigné. Car si aimer c’est risquer, ce n’est sûrement pas baisser les bras.

Durant ce mois de juin, beaucoup de collégiens sont invités, un peu partout en France, à proclamer leur foi au cours d’une célébration du dimanche. Et c’est ce Dieu-là, dont ils vont dire qu’ils veulent le suivre et l’aimer. La question que je me pose aujourd’hui, c’est : qu’est-ce que cela peut changer dans nos vies ? Cela ne changera rien et cela changera tout.

Cela ne changera rien, probablement, car il n’y aura pas de coup de baguette magique. Car il nous respecte bien trop pour tenter de nous épater. Mes défauts, tes défauts, les défauts de chacun, resteront bien en place. Et croire et aimer quand on se sait si imparfait, c’est un défi. Et on le sait bien, combien les chrétiens, sont, sur ce point-là, désespérément comme les autres, pas mieux du tout. Et lorsque Jésus dit de pardonner 70 fois 7 fois, autant dire qu’il demande l’impossible. Et lorsqu’il dit d’aimer ses ennemis, autant capituler d’avance. Il n’offre aucune assurance sur la vie, aucune certitude pour demain, il promet simplement que demain, avec lui, ce sera différent.

Pourquoi ? Parce que tu l’as bien compris, croire en ce Dieu-là, ça bouleverse tout. Car si nous donnons à notre Dieu le nom compliqué de Trinité, ce n’est pas pour faire joli. C’est parce que c’est vital, Jésus nous dit que sans cette réalité il n’aurait rien pu faire. En Dieu il y a l’amour qui circule, qui se donne, qui se reçoit, c’est un Dieu qui a besoin de l’autre. C’est un Dieu qui a besoin de toi. Il ne te prendra rien, il ne forcera jamais rien. Mais il appelle, depuis que l’homme a la conscience de lui-même, il ne cesse de l’appeler.

Si tu crois que Dieu est Père, alors tu viens de quelque part, tu n’es pas sur terre par hasard, juste pour en consommer les biens, comme si la vie était une gigantesque course au supermarché. Tu viens d’un projet d’amour qui est bien plus ancien que toi, que tes parents, que tes ancêtres. Et ce Dieu Père, créateur de tout ce qui existe, visible ou non, te dit de faire de ta vie une réponse à cette beauté originelle, en mettant, en tout ce que tu feras, la même patience d’amour qui est la sienne. En ne condamnant pas d’emblée ce que tu ne comprends pas, en voyant en l’autre les mêmes trésors inouïs que le Père voit en toi. Et alors, tu verras, les mots de justice et de pardon ne seront plus de simples rêves mais une réalité qui change le monde.

Si tu crois que Dieu est Fils en Jésus, alors tu comprendras qu’en se faisant l’un des nôtres, en acceptant nos limites et nos misères, Dieu s’est fait tout proche, contrairement à ce que l’on croit.

Il s’est approché de l’humanité en se faisant petit. Parce que ce qui est petit ne s’impose jamais. N’oublie jamais cela. C’est un Dieu qui frappe à la porte et qui attend qu’elle s’ouvre. Les ouvertures à Dieu dans ta vie, c’est toi qui les créeras ou ne les créera pas, et personne d’autre. C’est toi, qui, toujours, choisiras d’ouvrir ou de fermer, face à ce

Jésus qui ne cesse de dire à l’homme, comme il le dit dans l’Evangile: Que veux-tu ? Quel est le désir profond de ton coeur ? Comment fais-tu grandir les dons que tu as reçu ? Qui est ton prochain ? Et si Jésus est ce message personnel que le Père t’adresse, alors oui, sûrement, la mort n’a pas pu engloutir un tel projet, la mort, qui était une impasse, est devenue chemin. Et cette vie, un tremplin pour plus haut et plus grand. Mais il ne faut pas attendre d’être mort pour commencer à vivre vraiment, croire en Jésus c’est commencer une vie de vivant, lui qui dit qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie.

Si tu crois qu’il y a entre Jésus et le Père du ciel un amour indestructible, si fort que nous croyons en lui et que nous l’appelons Esprit Saint, et que par le baptême l’Esprit Saint vit et circule et respire en toi, alors tu accepteras que grandisse en toi la liberté d’aimer, et le désir de la vérité. Tu n’en auras pas peur, tu découvriras que seul, on n’est rien. Que ce qui compte, ce n’est pas les relations que j’ai mais ce que je fais de mes relations. Rien ne va changer, tu auras toujours tes mêmes questions, tes mêmes angoisses peut-être. Mais peut-être aussi qu’à cause de ton regard qui changera sur eux, alors tu les changeras, eux aussi. Je ne dis pas que tu les convertiras, il ne s’agit pas de cela. Mais tu les aideras, peut-être, en devenant davantage toi-même, à ce qu’ils deviennent eux-mêmes un peu plus. Car je fais te faire une confidence : le Dieu d’amour Père-Fils-et-St-Esprit ne t’enfermera jamais dans aucune boîte, ne cherchera jamais à faire ton bonheur malgré toi. Parce que c’est un Dieu qui croit en toi, en ce qu’il y a de meilleur au fond de toi-même, quand bien même ce serait enfoui. Il ne te demande pas de devenir un autre, il t’offre de découvrir combien ce meilleur est déjà là, en toi, en l’autre, au coeur du monde. Le voir, c’est déjà tout changer. Jésus l’avait très bien compris. Ses trois années de vie publique ont été un extraordinaire révélateur de qui est Dieu et de qui est l’homme avec Dieu. Ca change tout, n’est-ce pas ? Et pourtant, cela ne change rien. En disant « je crois » tu dis aussi, à la suite de ce Dieu qui aime tellement notre liberté, « je décide ».

Emeric DUPONT

 

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